Retour sur #TEB2016

Les auteurs : Nicolas Perisse (et les Twittos présents à #TEB2016 et notamment @PhilippineFDM, @eybled, @jmm403, @sourisetgrise et @CotCotCotApps que je remercie pour leur live tweet #TEB2016 qui permettra de compléter cet article)

EDIT : Vous pouvez retrouver le compte-rendu officiel de la matinée ICI.

Ce lundi, Jeuxvidéothèque a bravé, non sans difficultés, les transports en commun pour se rendre à #TEB2016 au Labo de l’Edition. Au programme : mises au point, conseils et de belles découvertes.

#TEB2016 qu’est-ce que c’est ?

#TEB2016 désigne « Tablettes En Bibliothèque ». C’est la seconde édition d’un événement organisé par La Souris Grise, spécialiste en édition, conseil et formation professionnelle autour des activités numériques jeunesses et familiales.

Cette matinée gratuite s’adressait à tous les bibliothécaires, et autres animateurs de structures, désireux d’en savoir plus sur la mise en place d’une offre de tablette en bibliothèque. L’occasion de faire le point sur des questions d’organisation, de législation et d’animation avec des intervenants concernés par le sujet.

Progamme de TEB2016 :

  • 9h : Accueil
  • 9h30 – 10h45 : Pratiques et éthiques d’acquisition de ressources applicatives 
    • Une table ronde pour répondre aux nombreuses questions des bibliothécaires et médiateurs culturels à propos des OVNI applicatifs.
    • Comment acquérir et utiliser des ressources applicatives ? Combien d’achats faut-il prévoir en fonction de son parc de tablettes ? Comment peut-on acheter en nombre ? Peut-on toujours utiliser des applications en animation ?
    • Premiers attendus : Odile Flament, fondatrice de l’éditeur Cotcotcot-apps.com; Yanick Gourville, formateur Souris Grise.
  • 10h45 – 11h15 : Pause et échanges
  • 11h15 – 13h : Témoignages et retours d’expérience en Haute Marne et en Poitou-Charentes
    • Témoignage de la Médiathèque départementale de la Haute-Marne. Avec Sylviane Barrand, directrice; Sophie Merger, responsable TIC et Benoit Garnier, directeur-adjoint et responsable de la médiation numérique.
    • Témoignage du Centre du livre et de la lecture en Poitou-Charente. Avec Sylvia Loiseau, responsable du pôle Vie littéraire et développement de la lecture.
Acheter des applications en bibliothèque

La journée commence fort avec un point sur les pratiques d’acquisition des applications en bibliothèque.

Techniquement, Apple et Google permettent de connecter plusieurs appareils sous un même compte, permettant de synchroniser ses différents supports (un smartphone et une tablette par exemple) et ainsi de gérer plus facilement ses outils numériques. Une aubaine pour les structures qui, sous prétexte d’économie financière et de temps, peuvent acheter une seule application pour équiper un parc d’une dizaine, voire d’une centaine de tablettes. Sauf que tout ça, ça n’est pas très légal…

Les conditions générales de vente indiquées sur le store d’Apple sont explicites : elles ne concernent que les particuliers et non les bibliothèques. Pour elles, la règle est claire : 1 application = 1 seule tablette ! Toutes les bibliothèques qui procèdent autrement sont en infraction avec les CGDV.

Les bibliothécaires peuvent se défendre :

On fait la promotion des applications dans nos animations, on achète 1 seul exemplaire mais on sait que notre public ira l’acheter ensuite.

Mais dans la réalité, si les parents sont très demandeurs de connaître les applis de qualité pour occuper leurs enfants, ils ne font/feront pas tous cette démarche. D’ailleurs, combien d’entre eux se rendent en librairie pour acheter l’album qui a tellement plu à leur enfant après une heure du conte ? « La bibliothèque n’est pas un réseau marketing mais le 1er réseau de vente pour les éditeurs. » rappelle Odile Flament.

On n’a pas toujours un budget suffisant pour acheter une même appli pour toute les tablettes.

Volonté des élus ou du personnel, acheter des tablettes nécessite un budget fixe, mais pour présenter régulièrement de nouvelles applis, il faut penser un budget annuel qui est malheureusement souvent dérisoire. « 15€ par tablette pour un parc de 5 tablettes » autrement dit rien pour permettre une offre conséquente.

D’autant plus qu’un achat en bibliothèque n’est pas toujours chose aisée. Très peu de médiathèques disposent d’une carte bleue, même alimentée et bloquée. La plupart du temps, elles se tournent vers les cartes prépayées iTunes. Un achat qui, s’il n’est pas budgété à part, peut parfaitement s’intégrer à la poldoc.

D’autres problèmes techniques peuvent se poser et auxquels seule la DSI peut répondre. Il ne faut hésiter à inviter la DSI à participer à la conception du projet pour mieux leur faire comprendre les objectifs et enjeux de celui-ci. Mais si certaines équipes informatiques répondent favorablement aux demandes, on sent bien que ce n’est pas toujours le cas.

Statut éducation et achat en volume

Quelle solution alors pour acquérir une application sur un nombre important de supports à moindre frais ? Se tourner vers un revendeur agréé pour obtenir le statut « éducation ».

En effet, Apple a mis en place ce service pour faciliter le déploiement d’applications sur les parcs de tablettes nombreuses. Ce statut permet à la fois une centralisation de la gestion des applications sur toutes les tablettes connectées mais surtout une remise importante (50% et plus) lors de l’achat en volume. Pour obtenir ce statut, il faut « prévoir une stratégie de déploiement » et de préférence faire la demande depuis le service de lecture publique de sa collectivité qui donnera plus de crédit au projet que le service informatique par exemple. A noter que ce statut n’est intéressant qu’à partir d’un certain nombre de tablettes.

Et sur Android ? Pas d’achat en volume possible pour le moment. Le service de Google Play, contacté par chat, aurait même proposé « d’utiliser les pratiques grand public pour le milieu professionnel ». Autrement dit, 1 même compte pour plusieurs tablette, et donc l’achat d’une appli pour plusieurs supports, reste ici la seule solution technique.

Bibliothèque et soutien à l’édition


Une application, ça coûte cher. Même si ça se termine en 10 minutes, c’est extrêmement cher à développer. Un coût dépassant facilement des dizaines de milliers d’euros voire bien plus. Pourtant, elles ne sont vendues qu’à quelques euros, voire quelques centimes, et pourtant, des bibliothèques ayant les moyens de s’offrir un parc de tablettes conséquent va trouver cela trop cher pour investir dans plusieurs exemplaires.

L’édition numérique est encore jeune, à peine 6 ans, et elle est déjà en difficulté. Nombreux sont les éditeurs qui ont du mettre la clé sous la porte face aux difficultés pour rentabiliser leurs créations. Aux tarifs infimes imposés par les plate-formes de vente des constructeurs, voilà que les bibliothèques refusent elles aussi de se plier à l’achat unique par support, sans oublier ceux qui attendent impatiemment dans leur coin que l’application tombe dans l’offre gratuite quotidienne pour se jeter dessus.

Il est tout naturellement rappelé qu’acheter un exemplaire d’application par tablette, c’est soutenir l’édition numérique. Les plate-formes iTunes et Google Play regorgent d’applications au développement bancal et sans intérêt qui s’offrent gratuitement et gagnent davantage d’argent en nous assommant à coup de pop-ups publicitaires intrusifs. Soutenir l’édition numérique, c’est soutenir la création et lancer un message fort aux auteurs traditionnels, ceux-là même qui refusent de s’y essayer sous prétexte que ça ne rapporte rien. Bien évidemment, les bibliothèques ne sauveront pas l’édition numérique, mais elles peuvent s’engager dans cette démarche et surtout valoriser l’application numérique comme une oeuvre et non comme un simple programme informatique sans valeur.

Je pense qu’il est aussi important de rappeler que c’est également aux éditeurs de nous montrer que les applications sont des oeuvres à part entière. Des oeuvres originales issues d’artistes numériques ou traditionnels et apportant ce que l’on ne trouve pas dans une offre papier classique. Faire en sorte de valoriser la tablette comme seul support de ces applications.

Valises numériques et retours d’expérience

Après une pause découverte d’applis (à ce sujet, je vous renvoie aux tweets de @ybled qui a participé au groupe « Applications et handicap ») nous voilà de retour pour la seconde partie de la matinée.

Acheter des tablettes coûte cher. Acheter des applications demande un coût d’investissement plus ou moins important. Mais comment tester avant d’acheter ? Comment prendre en main le matériel quand on n’est pas geek ou technophile ? Comment savoir si les usagers vont répondre favorablement à une proposition qui coûte chère ? Pour cela, il faut se tourner vers des structures chargées d’aider au développement des services en bibliothèque comme ici avec la Médiathèque Départementale de Haute Marne (MDHM) et le Centre du Livre et de la Lecture en Poitou-Charente.

Mettre à disposition du matériel : tablette, liseuse, console de jeux vidéo, robot de programmation, etc., former les bibliothécaires à leur utilisation pour mieux leur permettre de développer de nouvelles formes de médiation, les accompagner dans leur développement des outils numériques au même titre que les autres supports, voilà quelques missions que se donnent les BDP et centre régionaux.

La MDHM propose tout d’abord un site de ressources numériques traditionnelles : la Webothèque 52. Mais elle met également à disposition des valises numériques contenant 8 tablettes Samsung Tab 4 contenant chacune une carte SD permettant ainsi de proposer une soixantaine d’applis par tablette. App Lock est utilisé pour gérer l’accès aux applis, qui sont classées par dossier thématiques, et le système Chromecast pour permettre la projection. De nombreuses ressources et ateliers sont proposés.

Une autre valise « Autour du numérique » propose une variété de supports.


Et bien sûr « Jeux vidéo » avec Wii U, PS4 ou encore 3DS et des animations étonnantes


Enfin, des valises « Robot » avec des Dash and Dot et des Bee Bot tandis qu’un Ozo Bot est en préparation.

Le bilan montre l’aspect chronophage de la gestion du matériel et l’importance de la formation des personnels qui doivent acquérir de nouvelles compétences, sans oublier qu’un départ en retraite peut être l’occasion de redéfinir un poste et donc recruter une personne disposant déjà des compétences nécessaires. Le public de son côté est satisfait par tant de nouveautés.

En Poitou-Charente, c’est le Kit@lire, une bibliothèque numérique nomade, qui est proposé.


A l’image des Ideabox, le Kit@lire est conçu pour se déployer facilement partout, aussi bien en bibliothèque que dans les écoles, les cafés, sur les marchés, etc. Le Centre du Livre et de la Lecture veut valoriser le numérique sans oublier les supports traditionnels ! Aussi dans ces boîtes, on propose aussi bien des écrans que des livres. Un dossier pédagogique est disponible en ligne. Il rend compte de ce qu’il est possible de faire avec le Kit@lire comme des ateliers de poésie, de lecture, d’écriture, d’image, de booktube, de fabrication de livre numérique simple ou enrichi.

Pour l’obtenir, il faut avoir un projet à développer mais selon les retours, la première utilisation est généralement une phase de découverte et d’expérimentation. Après cette première prise en main, les bibliothèques savent ce qu’il est possible de faire et envisagent des projets plus aboutis avec leur partenaires pour une prochaine réservation du kit.

La matinée s’achève ainsi sur de belles présentations et de nouvelles idées à développer. Comme l’édition, les bibliothèques qui exploitent le numérique n’en sont qu’à leur balbutiement et il reste beaucoup à faire, entre médiation et création. Pourtant, certains prédisent déjà la mort de la tablette, il est vrai qu’entre un smartphone et un PC, la tablette, hormis son confort de visionnage, cherche encore une utilisation qui lui soit propre à elle-même. Mais en donnant accès à des outils de plus en plus répandus et en montrant l’étendue des capacités  de ces dernières, les médiathèques ont déjà investi sur ces supports tactiles et interactifs qui leur permettent de compléter leurs ressources numériques.

Photos

Si vous souhaitez voir les photos de la journée, elles sont disponibles sur la page Facebook de la Souris Grise.

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