Nintendo Labo en médiathèque

Janvier 2018, voilà prêt d’un an que la console Switch est sortie et que la firme se distingue par un chiffre record de vente. Pourtant, la petite console n’avait pas fini de nous révéler son potentiel et c’est dans une étonnante vidéo que Nintendo a dévoilé un nouveau concept : Nintendo Labo ! Il s’agit de packs d’accessoires, appelés Toy-Con, qui se présentent sous la forme de cartons prédécoupés qu’il faut plier et assembler. Une fois montés, ces accessoires peuvent accueillir l’écran et les Joy-Con et ainsi proposer de nouvelles façons de jouer et d’explorer les possibilités infinies de la console.

LES TOY-CON

Toy-Con, c’est le nom donné à ces packs qui comprennent plusieurs planches de cartons avec des formes prédécoupées et qui sont à assembler. Toy-Con 1 Multi-kit pour un ensemble de d’accessoires (voiture télécommandée, piano, guidon de moto, maison et canne à pêche), Toy-Con 2 : kit robot pour construire un système interactif pieds et mains. Un Toy-Con 3 : Véhicule Kit va également sortir en septembre, permettant d’assembler divers accessoires de conduite. Chaque kit est vendu avec une cartouche comprenant les tutoriaux animés de construction et les jeux pour chaque accessoire. Le prix ? Tout simplement celui d’un jeu : une soixantaine d’euros.

COMMENT CA MARCHE ?

Une fois monté, les cartons disposent d’un emplacement pour insérer l’écran de la Switch et/ou les Joy-Con, permetant d’interagir directement avec le modèle cartonné. Par exemple, la voiture télécommandée est faite pour accueillir les Joy-Con qui vont vibrer lorsque l’on appuie sur l’écran, faisant ainsi avancer le carton. Dans le cas de la canne à pêche, ce sont les gyroscope qui sont mis à l’épreuve, faisant descendre ou remonter l’hameçon à l’écran en fonction du mouvement de rotation du moulinet. Enfin, pour la maison, c’est la caméra infrarouge du Joy-Con droit qui sert à reconnaître les repères réfléchissants collés sur les 3 interrupteurs conçus pour le modèle. Il est évidemment nécessaire d’explorer au maximum les diverses possibilités du jeu afin de se rendre compte du potentiels de chaque éléments.

ASSEMBLAGE ET MANIPULATION

Pas de notice dans la boîte, autrement dit, sans la cartouche, impossible de réaliser le montage. Fort heureusement, on trouve déjà des vidéos disponibles sur Youtube (ce qui peut être pratique afin de se passer de la console ou de réaliser plusieurs montages en même temps). La construction se fait pas-à-pas et au rythme de chacun puisque la lecture de l’animation n’est pas automatique (ce qui devient rapidement un inconvénient sur les étapes répétitives). De plus, on peut zoomer sur l’image et la faire pivoter pour mieux voir les détails.

Sur la question de la fragilité, il faut tout de même le dire, les cartons sont assez légers et peuvent facilement s’abîmer si l’on ne fait pas attention (un pli de travers est vite arrivé). Les figures sont plutôt bien prédécoupées dans les cartons et globalement, le principal soucis est de les détacher malgré tout soigneusement sans arracher une patte ou déchirer la surface.
Une fois monté en revanche, l’ensemble est plutôt solide, ce qui n’empêche pas certaines précautions à avoir. Mais une fois terminée, il me semble que le plus contraignant sera de trouver comment stocker ces accessoires, qui peuvent prendre une certaine place, sans les abîmer. A noter que certains d’entre eux comme le piano, la maison ou encore le sac à dos du kit robot, permettent de ranger les petits éléments qui leur sont associés, nécessitant pour cela certaines manipulations prévues pour ouvrir les boîtes.

REJOUABILITE

Peut-on construire et déconstruire les modèles à notre guise et ainsi répéter ses ateliers à maintes reprises ?

Sans doute… mais !
Comme indiqué plus haut, le carton reste fragile, mais avec beaucoup de précautions, on peut évidemment tout démonter mais ce serait au risque d’abîmer ou de fragiliser le carton. Donc c’est possible mais on ne vous le conseille pas.
Comment faire alors ?
Plusieurs solutions existent :

  • Racheter des boîtes complètes : 70€ pour 5 figures + une cartouche de jeu. C’est cher et ça n’a de sens que si vous disposez de plusieurs consoles sur place. Nintendo propose aussi des kits complets sans le jeu sur sa boutique en ligne aux alentours de 30€.
  • Racheter des modules de rechange : Nintendo a mis en vente les modules séparés pour des prix allant de 6 à 12 euros selon le module.
  • Imprimer les modules : Nintendo a mis en ligne l’intégralité des modules (https://www.nintendo.co.jp/labo/parts/ ) Évidemment, la tâche est plus délicate puisque la taille des cartons est plus grande qu’une feuille A3. Le mieux est encore de conserver toutes les planches vidées pour ainsi les reproduire directement sur des cartons fins (on n’a pas testé mais les cartons à pizza, taille familiale, pourraient être très utiles !) Et bien sûr, si vous disposez d’un fablab à proximité avec une découpeuse laser (ou vinyle) vous pouvez essayer de monter un projet avec eux.
  • Imprimer en 3D : certains modèles sont déjà diffusés pour remplacer les modèles en carton. Cela reviendrait à abandonner totalement la phase de construction mais peut ouvrir à d’autres possibilités d’ateliers de modélisation basé sur les modèles existants (que vous pourrez alors compléter) ou sur de nouveaux modèles à développer.

Mais la rejouabilité doit-elle passer forcément par les propositions cartonnées de Nintendo ? En effet, si le constructeur a su nous séduire avec ces nouveaux accessoires, il a aussi inclus dans ses cartouches un logiciel de programmation permettant d’exploiter les multiples fonctions de sa console et c’est là que le titre prend tout son sens ! D’ailleurs Nintendo l’a bien compris et encourage même les utilisateurs à partager leurs créations et surtout en lançant le Contest, un concours pour inciter les joueurs à inventer de nouvelles formes d’accessoires et de nouvelles façons de jouer.

QUE FAIRE EN ANIMATION ?

Une fois que vous l’avez en main, 2 solutions s’offrent à vous : tout déballer et construire chaque accessoire pour permettre à vos usagers de les prendre en main ou bien tout simplement les laisser faire et construire avec eux leurs nouveaux jouets vidéoludiques. Voici quelques retours d’expérience.

Nicolas PERISSE (Médiathèque Visages du Monde, Cergy)

Nous avons proposé un atelier découverte lors de notre après-midi jeux vidéo, une animation trimestrielle d’environ 2h. Avec un groupe de 8 enfants de 6 à 11 ans, nous avons choisi de construire 2 modules. Le premier était la voiture téléguidée et le second, choisi par leur soin, était la maison.

J’avais déjà pris soin de monter la canne à pêche à titre d’essai afin de prendre en main le kit et de comprendre comment se faisait les constructions. Cela me paraissait une étape essentielle pour repérer les facilités et les défauts qui pouvaient bloquer au moment de l’animation.

Après leur avoir fait tester, et les avoir averti sur la fragilité des accessoires, place à la manipulation. Je me chargeais de tenir la Switch et faisait défiler la vidéo. J’ai pris soin de m’impliquer le moins possible dans la manipulation des cartons. Si je repérais une erreur, je faisais de nouveau défiler la vidéo afin qu’ils comprennent par eux-mêmes et en dernier recours seulement je prenais la figure pour assurer un pli ou remettre l’assemblage dans le bon sens.

Premier jeu : retrouver les éléments à découper sur les planches, c’est tout bête mais ça marche. Et ça fonctionne à peu près de la même manière pour la suite, on leur montre la vidéo et à eux de trouver le pli à marquer et de les faire à tour de rôle. Le premier module est allé très vite. Le second a demandé un peu plus de temps mais tous ont joué le jeu jusqu’au bout avec la plus grande attention et ont tous été très minutieux. Repérage, sens de la figure, pli du bon côté, assemblage… Oui, ce fut surtout un atelier créatif (et de repère spatial) plutôt qu’une animation jeux vidéo. A la fin de chaque figure, un petit temps pour tester et comprendre comment ça marche. Le tout en 2h. Alors certes, la progression pas-à-pas est un frein en groupe, d’autant que chacun participe par son « tour de pli », ce qui n’est guère valorisant. Ce n’est finalement qu’une fois le modèle monté que ça devient intéressant puisqu’on peut analyser et tenter de comprendre le fonctionnement.

Lors d’une 2e animation qui devait se dérouler sur 4h dans le cadre d’une journée dédiée aux activités numériques, je leur ai proposé de monter le robot. De la même façon, je me suis chargé de manipuler la vidéo tuto pour leur laisser le soin des manipulations. Malheureusement, le kit robot comporte de très nombreuses étapes et nous n’avons pas eu le temps d’aller jusqu’au bout. Même si certains éléments se répètent jusqu’à 4 fois à l’identique, les 4h, avec une pause au milieu, nous ont permis d’arriver environ aux 3/4 de la construction. Bien qu’ils aient pris plaisir à travailler ensemble, ils étaient malgré tout déçus de ne pas avoir pu tester la construction. Aussi, je ne peux que vous conseiller de prévoir une journée supplémentaire de découverte du jeu rapidement après (animation le mercredi et démonstration le samedi par exemple) ce qui vous laissera le temps de terminer la construction et sera moins frustrant pour eux de savoir que l’atelier se concentre sur la création et qu’une autre animation est prévue quelques jour plus tard pour tout simplement jouer avec.

François FLORIANT (Médiathèque de la Porte des Vosges Méridionales)

L’animation a été proposée dans le cadre d’un cycle d’ateliers réguliers, les cyberkids (1 samedi par mois). Ces ateliers étant limités à 1h30, nous avons choisi de n’exploiter qu’une seule des constructions du kit, la canne à pêche.

Pour me familiariser avec l’assemblage des pièces (et avec la simulation de pêche sur la console !)  j’ai procédé à un premier montage en amont de la séance. En prenant garde de pas abîmer le carton, il s’est avéré facile de démonter l’objet et de replacer les pièces dans les planches. Une grosse part du montage étant consacrée au pliage des pièces, nous avons ainsi gagné pas mal de temps le jour de l’animation avec nos pièces « prépliées » (car même remises dans les planches, les plis restent bien prononcés)

La contrainte n°1 pour cet atelier est bien sûr de ne disposer que d’une seule console pour un groupe de 8 enfants. Il faut veiller à ce que chacun d’eux participe à la construction à tour de rôle, sans perte de rythme pour éviter que certains ne s’ennuient. Le fait de relier la console à un écran externe, plutôt que suivre les instructions directement sur la console, permet de mieux capter l’attention des participants. J’ai pu constater un bon esprit d’entraide entre les enfants, certains corrigeant d’éventuelles erreurs de pliage des autres. En fait je ne suis quasiment pas intervenu dans le contrôle du montage, les enfants se donnant eux-mêmes les bonnes recommandations !

La canne a été montée en un peu moins d’une heure – j’avais misé sur beaucoup plus long – ce qui nous a permis de consacrer 1/2 heure au jeu en lui-même. Cette sympathique simulation de pêche présente l’avantage d’une prise en main immédiate et autorise des temps de jeu très courts (chaque enfant passe la canne au suivant après avoir au moins réussi à ferrer un poisson, qu’il l’ait sorti de l’eau ou que la ligne ait cassé avant). Un concours de la meilleure prise s’est spontanément mis en place et l’esprit de compétition s’est rapidement emparé des enfants !

L’engouement des enfants nous motive à proposer une série d’ateliers Nintendo Labo. Nous réfléchissons à leur organisation, compte tenu des temps de construction beaucoup plus longs pour le piano et la maison. Personnellement l’étape de fabrication de l’objet me parait indispensable à l’expérience. On pourrait choisir de monter tous les kits à l’avance et de ne consacrer l’animation qu’aux jeux vidéo associés mais on perdrait tout le fun de l’aspect « bricolage ».

A plus ou moins long terme, on aimerait bien sûr pouvoir exploiter le « Toy-Con garage » avec des inventions personnelles mais cela nécessite un temps d’autoformation qui pour l’instant nous manque…

CONSEILS

Notre conseil pour de nouveaux ateliers : oubliez les cartons de la boîte ! Oubliez les propositions de Nintendo ou plutôt laissez-les en exemples et employez-les pour leur pouvoir de séduction. Dès lors, tout reste à inventer, avec votre public, aussi bien dans des ateliers créatifs manuels que dans des ateliers de programmation.

Atelier récup : Et si on tentait de reproduire sous de nouvelles formes les figures proposées ? Après tout, une voiture peut avoir de multiples formes, un guidon de moto peut aussi devenir un volant, voire un guidon géant , etc.

Atelier customisation : Nintendo a aussi prévu quelques boîtes d’autocollants servants à décorer les accessoires. Ceci dit, quelques feutres, crayons de couleurs ou pinceaux à peinture font également l’affaire pour transformer chaque objet en une véritable oeuvre d’art. Et bien sûr, pourquoi ne pas se servir aussi de morceaux de cartons plus grands qui seront eux aussi décorés et collés directement sur vos objets ?

CONCLUSION

Vous l’aurez compris, il y a mille et une façon de s’emparer des ces Toy-Cons dans nos espaces jeux vidéo, que ce soit pour découvrir les jeux en même ou lors de compétitions (plus grosses prises de pêche, combat de véhicule, labyrinthes ou circuits à l’aveugle, compétition de démolition de ville avec le kit robot, etc.) ou dans des ateliers créatifs (customisation des accessoires, création de nouveaux jeux ou de nouveaux rythmes pour le piano, etc.) Nous reviendrons probablement sur les nombreuses possibilités dans la rubrique Animations et bien évidemment nous vous invitons d’ores et déjà à partager vos trouvailles et animations que vous avez pu mettre en place avec vos publics.

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